Le Conteur : Oyez, oyez, Bonne gens ! Prenez place. Mais avant que de vous asseoir auprès des élus de vos coeurs, avant de faire votre choix, il me faut vous séparer. Vous séparer pour quelques instants seulement, rassurez-vous. Ainsi, les femmes, avec la pudeur et la timidité naturelle qu'elles ont, se placeront de ce côté-ci et les hommes, plein de mâle assurance se placeront de ce côté-là.
Ce jury, ainsi départagé, ne pourra être taxé de partialité pour juger la question qui nous agite aujourd'hui :
Qui de l'homme ou de la femme a, le premier, donné l'exemple de l'inconstance et de l'infidélité en amour ?
Pour cela il vous faudrait avoir assisté au commencement du monde et de la société.
Or, (Quel heureux hasard !) il y a dix-huit ou dix-neuf ans que la dispute d'aujourd'hui s'éleva à la cour d'un roi, s'échauffa beaucoup et dura longtemps. Ce roi, naturellement assez philosophe, résolu de savoir à quoi s'en tenir, par une epreuve qui ne laissa rien à désirer. Quatre enfants au berceau, (Au public féminin) deux de votre sexe et (Au public masculin) deux du vôtre, furent portés dans la forêt où il avait fait bâtir une maison exprès pour eux, où chacun d'eux fut logé à part, et où actuellement même il occupe un terrain dont il n'est jamais sorti, de sorte qu'ils ne se sont jamais vus.
(deux marionnettes apparaissent au dessus du décor)
Ils ne connaissent encore que MESROU et sa femme CARISE qui les ont élevés, et qui ont toujours eu soin d'eux, et qui furent choisis de la couleur dont ils sont, afin que leurs élèves en fussent plus étonnés quand ils verraient d'autres hommes.
On va donc pour la première fois leur laisser la liberté de sortir de leur enceinte, et de se connaître ; on leur a appris la langue que nous parlons. Le monde et ses premières amours vont reparaître à vos yeux tels qu'ils y étaient, ou du moins tels qu'ils ont dû y être ; ce ne seront peut-être pas les mêmes aventures, mais ce seront les mêmes caractères ; et vous allez voir le même état de coeur, des âmes tout aussi neuves que les premières, encore plus neuves s'il est possible.
Par magie, je vous transporte en ce pays.
(Il lance sur le public une poudre étincelante)
Grâce à cette poudre vous serez invisibles à leurs yeux et pourrez ainsi juger pleinement de leurs actes. Ils ne pourront vous voir mais pourront vous entendre. Aussi restez cois et observez en silence...
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